logo
Accéder à l'en-tête Accéder au contenu principal Accéder au pied de page

Droit à l'image et autres contraintes en photographie

La réalisation d’une photographie peut être soumise à différentes contraintes. Ces contraintes se manifestent soit au stade de la captation soit au stade de l’exploitation.

Dans la mesure du possible, ces contraintes doivent être prises en compte dès la réalisation du cliché. Les exploitations futures pourront être en effet limitées par les contraintes qui n’auront pas été préalablement purgées.

Les principales contraintes applicables sont synthétisées dans le tableau qui suit.

Contraintes liées à l’image des personnes physiques
Le droit à l’image des personnes physiques identifiables sur le cliché
Le respect dû à la vie privée
Le traitement de l’image d’une personne, donnée à caractère personnel
La captation non autorisée de l’image d’une personne se trouvant dans un lieu privé
La publication non autorisée d’un montage intégrant l’image d’une personne
L’interdiction de diffuser l’image d’une personne mise en cause dans une procédure pénale
L’interdiction de diffuser l’image de certains mineurs
L’interdiction de diffuser l’image d’une personne victime d’agression sexuelle
L’interdiction de révéler l’identité de certains fonctionnaires ou militaires
Contraintes liées à l’image des biens
Le droit à l’image des biens mobiliers ou immobiliers
Les biens, créations protégées par un droit d’auteur
Les biens appartenant à l’Etat ou à des entités publiques
Contraintes liées aux marques, logos et autres signes d’identification commerciale
Les signes identifiant des produits ou services (marques, logos)
La représentation de dénominations sociales, noms commerciaux, enseignes
Contraintes liées aux évènements photographiés
La captation de photographies d’un évènement sportif
L’interdiction de photographier des débats judiciaires
L’interdiction de diffuser la reproduction des circonstances d’un crime ou d’un délit
Interdiction de diffuser des images relatives à la commission de certaines infractions
Contraintes liées aux modes de prise de vue
La réglementation des prises de vue aériennes
Contraintes liées à la signification du cliché
L’interdiction de publier, diffuser ou reproduire des nouvelles fausses
La diffamation et l’injure par l’image

Le droit à l’image des personnes physiques

L’image d’une personne, c’est toute caractéristique physique qui permet son identification. C’est donc avant tout son visage. Mais ce peut-être aussi tout ce qui permet de l’identifier. Cette identification peut résulter d’une caractéristique physique particulière, par hypothèse suffisamment distinctive pour que la personne puisse être identifiée.

Toute personne, quel que soit sa notoriété, peut s’opposer à la captation et à l’exploitation de son image.

En principe, toute personne physique identifiable sur un cliché doit avoir autorisé la captation et l’exploitation de son image.

Si l’autorisation peut être tacite, il est vivement recommandé de la formaliser dans un écrit. En effet, la preuve de l’existence et de l’étendue d’une autorisation tacite peut soulever d’importantes difficultés.

En outre, la Cour de cassation fait désormais montre d’une exigence formelle accrue. Si l’autorisation écrite relève de la liberté contractuelle, elle doit stipuler « de façon suffisamment claire les limites de l’autorisation donnée quant à sa durée, son domaine géographique, la nature des supports et l’exclusion de certains contextes » (Cass., 20.10.2021, 20-16343).

L’autorisation de la personne représentée n’est pas requise dans certaines hypothèses. Tel est le cas, notamment, en cas reproduction de l’image d’une personne dans le cadre de l’exercice du droit à l’information ou pour l’image des personnes décédées (en savoir plus).

La liberté de création artistique et photographie

Comme pour la liberté d’expression, la liberté de création trouve sa source à l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Dans quelle mesure la liberté de création dispense-t-elle le photographe d’avoir à solliciter l’autorisation de la personne photographiée pour capter puis exploiter son image ?

Il s’agit là encore de procéder concrètement à une mise en balance entre deux normes de valeur juridique équivalente à savoir la liberté d’expression et le droit à l’image.

Pour certains tribunaux, la liberté de création serait plus large que la liberté d’expression en ce qu’elle nécessiterait une liberté accrue de l’auteur qui peut s’exprimer tant sur les thèmes consensuels que sur des sujets qui heurtent, choquent, déplaisent ou inquiètent.

Si, à ce jour, la Cour de cassation ne s’est toujours pas prononcée, les tribunaux se montrent très favorable à la liberté de création : le droit à l’image devrait systématiquement céder devant la liberté de création.

La difficulté tient ici dans la distinction à opérer entre un travail photographique « artistique » et un travail photographique qui ne le serait pas.

On notera à ce titre que les décisions intervenues concernent des photographies destinées à figurer dans des ouvrages d’édition ou à des expositions. C’est donc, non pas tant le travail artistique proprement dit du photographe que le mode d’exploitation de nature « artistique » qui justifie ici la primauté accordée à la liberté de création.

Par ailleurs, la liberté d’expression artistique a pour limite le respect de la dignité de la personne représentée.

En matière d’art photographique, la créativité du photographe et sa liberté d’expression artistique n’auraient pour limites que le respect de la dignité de la personne représentée , même vulnérable, ou les conséquences d’une particulière gravité qu’entraînerait la publication des clichés pour cette personne (TGI Paris, 25.06.2007, 06/10149).

Pour apprécier si la dignité des personnes a bien été respectée, les tribunaux s’attachent notamment :

  • Au caractère loyal ou déloyal de la prise de vue ;
  • Aux circonstances révélant que la personne photographiée a tacitement accepté d’être photographiée ou, à tout le moins, ne s’y est pas opposée, même s’il s’agit de personnes psychologiquement fragiles ;
  • L’intérêt artistique de l’ouvrage d’édition dans lequel les clichés ont été publiés ;
  • Le traitement respectueux et tendre des sujets ;
  • L’absence de recherche du sensationnel ;
  • Une présentation non humiliante ou dégradante.

Il y a atteinte à la dignité de la personne lorsque l’image de cette dernière est utilisée dans un cadre dévalorisant, la faisant apparaître dans une scène sexuelle particulièrement crue et explicite, dans laquelle le plaisir sexuel se combine avec les plaisirs de l’alcool. Cette utilisation revêtait un caractère volontairement dévalorisant, visant à susciter la moquerie (CA Paris, 03.10.2019, 18/27200).

De même, dénudée ou non, la fixation photographique de l’image sexualisée de façon malsaine, d’une très jeune enfant ou d’une toute jeune fille ne peut qu’être dégradante pour celle-ci, quelle que soit l’intention de l’auteur ou la subjectivité du public auquel elle est destinée (CA Paris, 27.05.2015, 13/00051).

Un portrait, réalisé dans un cadre privé, au domicile de la famille, à la demande de celle-ci, sans projets de diffusion ou d’exposition publique n’autorise pas l’artiste photographe à utiliser l’image dans un contexte différent de celui pour lequel elle a été réalisée sans autorisation expresse de la personne concernée (CA Paris, 29.10.2014, 13/08445).

Le droit à l’image des biens

Le propriétaire d’une chose ne dispose pas d’un droit exclusif sur l’image de celle-ci mais il peut toutefois s’opposer à l’utilisation de cette image par un tiers lorsqu’elle lui cause un trouble anormal (CC-07.05.2004-02-10450).

Si cette règle s’applique également aux biens appartenant à des personnes publiques (Etat, collectivités territoriales …), les gestionnaires des immeubles appartenant aux domaines nationaux ont la faculté de soumettre à autorisation préalable l’utilisation de l’image de ces immeubles à des fins commerciales. De même, certains établissements publics, tels que les musées peuvent édicter des interdictions de photographier les biens se trouvant à l’intérieur de leurs locaux (en savoir plus).

En tout état de cause, l’image des biens, mobiliers ou immobiliers, protégeables au titre du droit d’auteur, ne peuvent être utilisée qu’avec l’autorisation préalable du titulaire des droits d’auteur attachés à ce bien. Attention, le titulaire des droits d’auteur ne doit pas être confondu avec le propriétaire du bien. Il existe toutefois des exceptions à cette règle (en savoir plus).

Les contraintes relevant du droit de la presse

La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse contient des dispositions affectant la liberté de réaliser et d’exploiter certains clichés.

L’article 35 ter punit d’amende, lorsqu’elle est réalisée sans l’accord de l’intéressé, la diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, de l’image d’une personne identifiée ou identifiable mise en cause à l’occasion d’une procédure pénale mais n’ayant pas fait l’objet d’un jugement de condamnation et faisant apparaître, soit que cette personne porte des menottes ou entraves, soit qu’elle est placée en détention provisoire.

L’article 35 quater punit d’amende la diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, de la reproduction des circonstances d’un crime ou d’un délit, lorsque cette reproduction porte gravement atteinte à la dignité d’une victime et qu’elle est réalisée sans l’accord de cette dernière.

L’article 38 ter interdit, dès l’ouverture de l’audience des juridictions administratives ou judiciaires, l’emploi de tout appareil permettant d’enregistrer, de fixer ou de transmettre l’image ainsi que la cession ou la publication d’image réalisée en violation de cette interdiction.

L’article 39 bis punit d’amende le fait de diffuser, de quelque manière que ce soit, des informations relatives à l’identité ou permettant l’identification : d’un mineur ayant quitté ses parents, son tuteur, la personne ou l’institution qui était chargée de sa garde ou à laquelle il était confié, d’un mineur délaissé, d’un mineur qui s’est suicidé ou d’un mineur victime d’une infraction.

L’article 39 quinquies interdit la diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, de renseignements concernant l’identité d’une victime d’une agression ou d’une atteinte sexuelles ou l’image de cette victime lorsqu’elle est identifiable.

L’article 39 sexies vise quant à lui l’identité des fonctionnaires de la police nationale, de militaires, de personnels civils du ministère de la défense ou d’agents des douanes appartenant à des services ou unités désignés par arrêté du ministre intéressé et dont les missions exigent, pour des raisons de sécurité, le respect de l’anonymat.

Sont également susceptibles de s’appliquer à des clichés :

  • Les articles 23 et 24 relatif aux provocations à commettre des crimes ou délits ;
  • L’article 27 relatif à la publication, la diffusion ou la reproduction, par quelque moyen que ce soit, de nouvelles fausses ;
  • L’article 29 relatif à la diffamation et aux injures.

Nos autres essentiels

Protégez vos photographies et droits d'auteurs : quelles protections ?
Les photographies peuvent être protégées via différents mécanismes juridiques : Ces « outils » peuvent se cumuler. D’autres mécanismes, tel que le droit des marques, peuvent éventuellement être sollicités. Ils ne seront toutefois mis en œuvre que pour des besoins très spécifiques.
Cession de droit ou licences d'utilisation pour vos photographies
L’exploitation d’une photographie suppose préalablement réglées les questions pratiques qui suivent : Qui est le titulaire des droits d’exploitation ? Qui sera ou seront le ou les utilisateurs du cliché ? Quel mode d’exploitation est envisagé ? Quelles contraintes sont applicables quant à l’exploitation du cliché ? Quel type de contrat est adapté à l’exploitation souhaitée ?
Que faire en cas d'utilisation de vos photographies sans autorisation ?
La multiplication, notamment via internet, des utilisations non autorisées de photographies, génère pour les titulaires des droits un important manque à gagner.
Action judiciaire en contrefaçon droit d'auteur
L’exercice d’une action judiciaire peut être envisagée en cas d’échec d’une tentative de règlement amiable. Afin d’éviter d’éventuelles déconvenues, sachant qu’une procédure est toujours affectée d’un aléa judiciaire, l’opportunité d’une telle action doit être soigneusement analysée tant d’un point de vue juridique que d’un point de vue pratique.